Cette année il a fallu innover : les vacances de ski se sont passées sans ski, avec le Jimouille mandaté pour découvrir 3 secteurs des Ecrins. L’action trépidante se passe donc du côté de Vallouise, de Pelvoux et d’Ailefroide (oui comme en été d’ailleurs).
Mais pour voir quoi au fait?
Une forêt saupoudrée de sucre glace la matin?
Oui, mais pas que.
Des coulées de neige de fin de journée marquant une fonte irrémédiable du fin manteau blanc de l’année?
Oui aussi, mais pas que.
Un peu d’astronomie histoire de profiter du ciel sans pollution?
Heu ça non, la transformation en stalactite nocturne n’était pas à l’ordre du jour.
Nous avons donc parcouru essentiellement 3 secteurs.
Le premier, entre Vallouise et Pelvoux (et même plus haut) nous a donné quelques inquiétudes : le coin à cincles plongeurs (Cinclus cinclus) semblait presque désert.
La sortie d’eau de l’usine hydro-électrique en amont du Gyr était pourtant bien dégagée…
La nourriture sous forme de larves de trichoptères (les porte-bois), était abondante…
… Et active.
Mais les faits étaient là : quand l’année dernière j’en voyais 6 ou 7 sur une longueur de 2.5 Km de rivière, cette année il n’y en avait que 3 ou 4.
Ajoutez à cela qu’ils étaient très méfiants, impossible de les approcher autant que l’année passée, que certains étaient de véritables coquins, du genre à tourner le dos juste au moment où le photographe appuyait sur le déclencheur…
… Y compris en prenant le bain, c’est dire!
Mon inexpérience de l’objectif utilisé a fait le reste. Il a donc été très compliqué d’obtenir ce genre de cliché…
… et je ne vous parle même pas du portrait de face.
L’explication la plus probable à cette « raréfaction » localisée des cincles est liée au fait que les cours d’eau étaient moins pris dans la glace, et que les cincles avaient plus de place. Certains étaient donc plus en amont du Gyr, comme j’ai pu le voir dans le torrent de l’Eychauda ou, pour la première fois, j’ai entendu et vu des cincles en février.
Il était temps de passer au secteur de l’Eychauda.
Là c’était plus sportif, le sac lourd se faisait sentir, mais le Jimouille, accroché façon cani-cross, faisait son boulot. C’est assez surprenant de voir ce qu’un chien de 17-18 Kg est capable de tracter et avec quelle force. Passons.
Nous sommes donc allés là…
Et même plus loin…
… en suivant le GR54 (puisque l’autre chemin menait au coeur du parc des Ecrins, interdit aux chiens et de toute façon, l’hiver tout seul il vaut mieux rester prudent). Nous sommes donc restés aux pieds de la montée au lac de l’Eychauda, ci-dessous au fond de vallée.
Bon, mais qui avait-il à voir là haut?
De la neige, forcément…
…Des paysages magiques le matin au lever du soleil
Et personne, ni même un bruit autre que celui du vent : une chose en raréfaction par les temps qui courent.
Bien sûr, il y avait de nombreux animaux, mais je n’ai jamais pu avoir une vue directe. La faute à la présence du chien (pourtant attaché), ou plus certainement aux bruits faits par mes chaussures de glacier sur cette neige changeante sans parler de l’heure de départ sûrement trop tardive.
On a donc repéré des traces de sangliers en nombre…
Dont un avait visiblement eu quelques problèmes qui resteront inexpliqués…
En passant tôt le matin au même endroit il n’y avait rien, ni même la moindre odeur. Quelques heures plus tard, il y avait cette moitié, qui avait sûrement glissée du haut de l’escarpement bordant le GR, soit à cause d’un renard ou d’un blaireau (j’ai repéré de nombreuses traces de ces deux là). Quant à la carcasse, un charognard à plumes s’en était visiblement occupé (il y avait un couple de grands corbeaux dans le secteur). Impossible de savoir ce qui avait provoqué la mort de cet animal sans avoir la tête. La piste du loup étant considérée comme peu probable par les locaux, il restait celle de l’animal blessé ou malade, ou encore celle d’une hypothétique prédation par un aigle royal (mais l’animal était déjà assez grand).
Dans un registre plus léger, la piste d’un lièvre nous a bien fait rire, jugez plutôt :
Et quand vous regardez la trace entière, vous vous demandez dans quel sens il a bien pu vouloir aller.
Enfin, j’ai pu honorer mon rendez-vous annuel avec des lézards des murailles (Podarcis muralis), aux mêmes endroits que d’habitude. Il a juste fallu attendre que la neige fonde un peu et il fallait penser à y aller aux heures chaudes de la journée. Voici donc un des curieux se préparant à lézarder…
… Ou encore celui-ci, semblant se demander à quoi je jouais.
Il était temps de prendre de la hauteur et de changer de secteur pour aller au fond à droite du Pelvoux…
… Dans une zone encaissée…
A Ailefroide donc.
Pour y voir quoi?
Des petits glaçons : les stalactites…
… Ainsi que des glaçons plus gros : le Glacier Blanc 5 Km plus loin.
A une telle distance, impossible d’avoir une vision nette du paysage à cause des flux thermiques, mais on reconnait quand même la glace déjà bleue sous la couche de neige.
Côté flore, il y avait l’habituelle hellébore fétide (Helleborus foetidus, Ranunculaceae) compliquée à prendre en photo…
… ainsi que quelques fougères.
Et côté animaux?
J’ai longtemps cru que je devrais me contenter de cette seule observation…
Trop loin, limite flou… Mais j’ai eu de la chance.
Pour ceux qui connaissent, je me suis arrêté boire un café dans la seule buvette d’Ailefroide toujours ouverte même l’hiver, et j’ai pu, pendant que le Jimouille draguait une copine, papoter chamois. Ca ne rate jamais, c’est comme si la personne avec laquelle je discutais avait un signal GPS indiquant la position des chamois. Il fallait avoir l’oeil pour les repérer, jugez par vous même (et encore, la photo a été traitée, ce qui facilite les choses).
Une autre plus facile.
Alors après, pour tenter de faire de meilleure photos, on s’est approché un peu (mais pas trop) et, comme pour les cincles, il a fallu se montrer patient car entre celui qui se cache derrière les branches et l’autre qui nous montrait son derrière…
Il a fallu attendre qu’un d’eux sorte des branches (tout comme moi)…
(au fait, vous avez vu le second?)
… Et s’affiche au grand jour.
Après il a bien fallu rentrer.
Le Jimouille s’en sera payé une sacrée tranche et il aura enfin gagné ses galons de « meilleurs copains ». Il a mis du temps, mais il faut dire que la barre était très haute.
Pour le making-of, il aura fallu au total 5 jours de rando (91 Km enregistrés sur Garmin) avec un sac de plus de 15 Kg contenant le matériel photo et bien sûr le matériel de sécurité puisque nous sommes en haute montagne et l’hiver. Cette année, comme souvent d’ailleurs, le secteur le plus dangereux était celui permettant de se rendre à Ailefroide. Alors c’est vrai que si côté avalanche de neige on était relativement tranquille, le risque provenait plutôt des chutes de blocs liées à la gélifraction. Or, pour se rendre à Aildefroide on a le choix entre la route et son couloir d’avalanche unique qui ne permet pas d’anticiper (quand on entend et/ou voit c’est trop tard), et le chemin partant de Pelvoux Les Claux, réputé moins dangereux, mais qui contient 3 couloirs d’avalanche dont la configuration permet une meilleure (enfin, il faut vite le dire) anticipation en cas de coulée de neige/chute de pierres.