Pour ceux qui découvrent et notent un changement de style et de ton, cette publication correspond avant tout à un compte rendu de ce que j’ai pu récolter comme données concernant les cigales en me restreignant à 2 lieux dans la ville de Gémenos. Cet article fait donc suite à un autre publié l’année dernière sur le même thème faisant état de la diversité des cigales en 2013 et en 2014.
Avant de passer à une partie plus statistique, petit résumé des observations marquantes de l’été 2015.
Pour la première fois, j’ai pu observer une mue imaginale (passage de la larve à l’adulte qu’on appelle imago) en colline, dans un milieu non modifié (en tout cas en apparence) par l’Homme. Rien de bien excitant pour beaucoup d’entre vous, ça fonctionne de la même façon que dans un jardin, mais quand même : ce petit plus n’est pas négligeable à mes yeux.
Il y encore eu des bousculades sur le grillage…
Et bien sûr, avec la bonne lumière et toute seule perchée en haut d’un brin d’herbe, il était possible de s’amuser un peu.
Les adultes, forts nombreux cet été là, étaient faciles à observer, telle cette cigale grise (Cicada orni, Hemiptera)…
… Plus facile à repérer de profil que de dos.
D’ailleurs, elle était tellement curieuse qu’on a sympathisé.
Bien évidemment, tout n’est pas rose dans le monde des cigales. Prenez cette plébéienne (Lyristes plebejus, Hemiptera) :
Soit vous vous dites qu’elle tente une imitation du roi lion sur une brindille d’herbe, et dans ce cas c’est beau, soit vous remarquez que son aile droite, en arrière plan, est anormalement recourbée vers le haut et qu’elle ne peut donc pas voler… Faisant d’elle une proie facile pour les prédateurs à plumes (moineaux, pies, choucas des tours pour ce que j’ai pu voir dans mon jardin), voire même les frelons européens pour les cigales grises, plus petites.
D’autres n’ont même pas eu le temps de finir leur mue imaginale et se sont faites dévorer par des fourmis (ici Crematogaster scutellaris) comme ici.
Bien évidemment, contrairement aux larves, les adultes ont une espérance de vie assez courte. En fin de vie les cigales adultes deviennent des cibles toutes désignées, voire tombe au sol à bout de force et là… C’est l’affluence. Une ouvrière qui fait peur à beaucoup de monde, alors qu’elle est peu agressive contrairement à sa cousine asiatique, vient faire le plein pour son nid : tout le monde s’écarte quand un frelon européen (Vespa crabro, Hymenoptera Vespidae) -insecte utile menacé par l’ignorance humaine- s’approche.
Ainsi va le cycle de la vie.
Ce que je n’ai pas pu immortaliser en photo dans mes lieux habituels :
- l’accouplement des cigales;
- la ponte que j’ai cependant pu observer une fois;
- l’éclosion et la migration des jeunes larves dans le sol.
Et cette année c’est mal parti, les cigales sont moins nombreuses et les larves sont sorties plus tardivement. A suivre donc.
Passons aux statistiques.
Quitte à me répéter, cet article fait suite à un autre publié l’année dernière sur le même thème faisant état de la diversité des cigales dans deux endroits de Gémenos (Dpt 13) en 2013 et en 2014. avec un peu de retard, justifié par la grande quantité d’exuvies à mesurer, voici les résultats pour 2015.
Je ne détaillerai pas la procédure suivie puisque c’est toujours la même : elle est donc toujours aussi critiquable puisque je ne mesure que la longueur totale de l’exuvie avec un pied à coulisse, en ne tenant pas compte de la courbure plus ou moins importante des exuvies.
Cette année j’ai effectué le sexage systématique des exuvies et seules celles dont le sexe a pu être déterminé, et qui étaient dans un bon état, ont été mesurées (ce qui a éliminé une trentaine d’exuvies sur un total, tous lieux confondus, de 683 exuvies).
Les données brutes sont disponibles dans un fichier qui, comme l’année précédente, est fourni sous licence creative commons BY-NC-ND 3.0 FR (j’y tiens, c’est la seule forme de reconnaissance potentielle que je peux avoir pour un site fait de façon totalement amateur et consultable sans pub aucune malgré ce qu’il me coûte) : Cigale_Exuvies_DeNatura_2015 (format ods de Open/Libre Office calc).
Les premières exuvies récoltées :
- 12 juin 2015 pour ce que j’appelle le parc (en fait l’espace boisé du collège de Gémenos);
- 21 juin 2015 pour mon jardin.
Dans le jardin en 2015, seulement 76 exuvies récoltées.
Comme indiqué plus haut, la prédation a été très importante et a été le fait essentiellement des oiseaux, très nombreux. J’avais en permanence 5 pies au sol dans le jardin, et une dizaine de moineaux domestiques.
Si les moineaux s’attaquaient souvent au jeunes imagos encore vertes et poursuivaient les adultes, les pies s’attaquaient directement aux larves.
Le résultat n’est donc pas très probant et je n’ai pas cherché à comparer avec l’année précédente tant l’effectif est faible.
Comme l’année dernière, j’ai séparé les grandes exuvies de Lyristes plebejus des petites de Cicada orni. Je n’ai entendu que le chant de ces deux espèces dans mon jardin.
Dans le parc en 2015, 607 exuvies récoltées, 577 mesurées.
Petite nouveauté, j’avais essayé de ramasser à heure fixe tous les jours, mais les disponibilités et l’impossibilité d’accéder au collège les week-end ont quelque peu biaisées cette démarche. Néanmoins j’obtiens un graphique intéressant (effectif cumulé).
J’espérai obtenir une courbe de type exponentiel pour tout dire (se terminant par un plateau forcément en fin d’émergence) puisque dans ce parc les sorties d’exuvies s’étalent du sud vers le nord avec des effectif en augmentation d’un jour sur l’autre. Ca reste donc une théorie à vérifier, et ce ne sera pas possible pour 2016, les effectifs étant trop faibles pour l’heure et, si d’aventure les mues imaginales étaient plus tardives, je n’aurais de toute façon plus accès au parc dans 2 jours…
Côté répartition d’effectif en fonction de la taille :
J’ai fait figurer sur le même graphique les données de 2014 et celles de 2015.
Dans les grandes lignes, l’interprétation de l’année dernière reste valide :
- plus de petites exuvies que de grandes;
- 3 espèces toujours identifiées au chant : les petites exuvies correspondent donc à priori à Cidata orni et à Cicadatra atra quand les grandes appartiennent toutes à L. plebejus;
Par contre, il m’est impossible de faire la distinction entre les deux plus petites espèces en me basant sur la seule taille des exuvies, ce qui m’amène à deux conclusions :
- mes mesures manquent de précision;
- mon hypothèse de l’année dernière me faisant voir une courbe bimodale du côté des petites exuvies lorsque je modifie les plages est surement erronée.
De fait, si j’arrive à une répartition de 52% de mâles et 48% de femelle pour L. plebejus, les 48.65% de mâles et 51.35% de femelle ne sont pas interprétables pour les petites exuvies… A moins que, le chant des cigales noires (Cicadatra atra) étant le moins fréquent, surtout en rapport avec celui de la cigale grise (Cidata orni) omniprésent, on considère que pour cette espèce il y a plus de femelles que de mâles.
Toujours est-il que vous imaginez bien que je ne vais pas recommencer mes mesures, parce que 577 exuvies ça a été long à mesurer 😉
A suivre donc.