3ème et dernier volet de notre séjour dans le Mercantour.
Pour rappel, nous avons atteint un camp de base, avant d’aller explorer quelques lacs.
Mon guide, quelque peu cabossé de la cheville, avait tout de même prévu une petite surprise avant de partir.
Il a donc fallu vider le camp de base, histoire de se rendre compte que ça pesait aussi lourd au retour qu’à l’aller, puis nous nous sommes dirigés vers un lac surprenant à tous points de vue.
Moi :
Encore un lac?
Le guide :
Oui mais celui là n’est pas comme les autres, tu verras!
Sur des paroles aussi appétissantes nous nous sommes mis en marche, la fébrilité était perceptible, les pupilles grandes ouvertes, et les oreilles aux aguets.
Il n’aura pas fallu attendre longtemps!
Regarde cette fleur!
Oui! C’est une épilobe et alors? Tu as dit que ce n’était pas la peine de les photographier hier!
Oui, oui! Mais celle là est recouverte de papillons!
Je n’avais jamais vu une scène pareille : une hespéride trônait tout fiérote en haut de l’inflorescence, pendant que les zygènes (Zygaena filipendulae, Lepidoptera Zygaenidae) s’entassaient sur la partie basse!
Ca commençait bien!
Plus loin, attiré par une couleur orange criarde, je me suis un peu trop approché et un petit cuivré m’a dévisagé.
Il a fallu reculer, car à l’évidence je dérangeais.
La vue globale n’était pas mal non plus…
… Je n’en n’avais jamais vu autant sur une si petite surface. Il me fallait connaitre leur nom. On a donc cherché (et trouvé) la fleur adéquate puis il a fallu patienter un peu.
Ne me demandez pas d’où vient son nom, mais ce cuivré semble être un cuivré de la verge d’or (Lycaena virgaureae, Lepidoptera Lycaenidae)… On l’appelle aussi le cuivré satiné. Il s’agit ici de 2 mâles. Pour la petite histoire, la plante sur laquelle ils sont posés est une épervière, dont la particularité est d’être capable de fabriquer une graine à partir d’ovule non fécondé (on parle d’apogamie)… Admirez le télescopage…
Heuuuu, tu crois que beaucoup vont aimer tes plaisanteries tordues de systématicien?
Oui, bon! J’arrête là mes divagations.
Histoire de compenser, il fallait trouver quelque chose. Malheureusement on n’a pas trouvé de guimauve, mais juste de la mauve (Malva moschata, Malvaceae), ça fera l’affaire…
Dis moi, c’est quoi cette passion soudaine pour le rose. Tu veux qu’on en parle?
Non! Non! Tout va bien. C’est juste un défi que je compte bien réussir!
D’ailleurs je passe au papillon qui a un nom de gâteau : le sablé (Agrodiaetus sp., Lepidoptera Lycaenidae)…
… Lequel possède une magnifique couleur bleue sur la face supérieure…
Et là il y a quoi?
Tu sais quoi? On a qu’à dire que ce sont des Lycanidae (azuré, sablé, argus et compagnie), ça sera plus simple!
Ce n’était pas possible! C’était un coup monté! Il y avait au moins 3 espèces différentes et je ne savais plus si je photographiais la face inférieure et supérieure du même papillon ou pas. C’était pourtant ma seule possibilité d’arriver à trouver leur nom!
C’est beau les liqua… Comment tu dis?
Oui c’est beau! Bon on avance là, parce que je vais faire une crise de nerf! J’ai l’impression de ne rien savoir sur tout!
Calme toi! Calme toi! Concentre toi sur le point rose là!
Mais! Mais, c’est quoi ça encore? On dirait des zygènes verts!
Ah tu ne connais pas non plus?
Ben non, c’est la première fois que j’en vois!
Montre moi un truc facile!
Tiens ça là!
Ouf, une renouée bistorte! Heu, mais ça veut dire que le lac est dans le coin!
Oui, il est derrière la fleur! C’est le lac des Grenouilles.
Super, on va voir des grenouilles alors!
Une heure plus tard la réponse est tombée : aucun amphibien n’était visible. Il y avait bien des canards, dont on se doutait de l’origine pour cause de proximité de la bergerie qui hébergeait un chien de chasse, mais aucune grenouille. La tuile!
Même le guide était dubitatif : pourquoi ils l’appellent le lac des grenouilles s’il n’y en a pas?
On n’était quand même pas venu jusque là pour prendre des cailloux dans l’eau!
Et c’est alors qu’un héron a décollé…
Pardon?
Oui oui un héron cendré… A 2000m d’altitude en pleine montagne… Il devait donc y avoir à manger, mais on n’en sera pas plus.
En attendant, pendant le vol de l’échassier, des cris stridents retentissaient dans toute la zone : à l’évidence ce devait être un héron mangeur de marmottes!
Le guide est redevenu dubitatif, le héron s’est posé, il était en place pour chasser.
Une décision fut prise.
Bon! Puisque nous sommes au lac des Grenouilles, autant aller voir les marmottes!
Aussitôt dit, aussitôt fait.
Mais celle-ci était loin.
Autre problème, des randonneurs arrivaient et une marmotte déteste surveiller 2 dangers potentiels en même temps (photographe et randonneur), donc elle se cache.
Il a fallu déployer des trésors de techniques sioux pour s’approcher sans trop éveiller l’attention…
… Sélectionner une marmotte correctement positionnée par rapport au soleil et pas située à proximité du chemin de randonnée, et donc des randonneurs, car sinon la marmotte devenait sportive.
Une fois qu’elle était tranquille et en place…
… Il a fallu lui demander de se mettre sur son plus beau profil, ce qu’elle a fini par faire.
Le photographe heureux que j’étais a donc doucement reculé pour laisser le rongeur tranquille. La marmotte n’est jamais rentrée en urgence dans son terrier, elle s’est même mise à fourrager comme si de rien n’était.
Il était temps de rentrer.
En redescendant, une petite surprise nous attendait côté fleur avec cette gentiane asclépiade (Gentiana asclepiadea, Gentianaceae).
Plus bas, un cuivré a tenté de nous narguer en se posant sur une fleur inconnue…
… Mais ça n’a pas pris, l’inconnue était une astrance (astrantia sp., Apiaceae).
Pour voir des chamois il aurait fallu marcher quelques heures supplémentaires et le temps nous manquait. Ce sera donc pour une autre fois.
Côté chemin suivi :
Le chemin, partant du parking au dessus de Castérino, est tantôt de terre tantôt pavé mais carrossable. Il est plutôt accessible pour les enfants, et assez ombragé (en tout cas le matin).